L’émission spéciale organisée par l’IFC en partenariat avec La Tribune Afrique à l’occasion de la visite officielle au Maroc de Makhtar Diop, a été l’occasion de passer en revue l’écosystème national des fintechs, d’identifier ses forces et les pistes d’amélioration, en vue de l’émergence de licornes.
Au Maroc, de plus en plus de startups s’engagent à innover pour favoriser l’inclusion financière, bénéficiant du réveil de l’écosystème caractérisé entre autres par la mobilisation des investisseurs et la considération qu’accordent les pouvoirs publics à cette problématique, même si beaucoup reste encore à faire. C’est en somme ce qui se dégage de l’émission spéciale organisée à Casablanca le 24 juin par la Société financière internationale (IFC), en partenariat avec La Tribune Afrique sous le thème : « Renforcer l’inclusion financière au Maroc grâce aux fintechs et à l’innovation ».
Créer des licornes, améliorer la réglementation
Makhtar Diop, directeur général de l’IFC qui effectuait au Maroc sa première visite officielle sur le continent africain depuis sa prise de fonction et la toute première visite d’un leader de cette institution du Groupe de la Banque mondiale au Maroc depuis 15 ans, a salué le dynamisme des fintechs marocaines qui contribuent considérablement à la financiarisation à travers le pays et au-delà. « C’est une priorité pour nous d’accompagner les startups. Cela nous permettra d’appuyer l’inclusion financière et de créer ces licornes qu’on espère voir émerger d’Afrique », a-t-il déclaré, évoquant l’engagement de l’IFC dans l’AfricaTech Awards 2022 annoncé à VivaTech à Paris récemment. « Les startups africaines sont valorisées sur le marché régional et international. Notre rôle à l’IFC en tant qu’institution globale est de permettre aux gens aux Etats-Unis de comprendre ce qui se passe Afrique, à ceux du continent de comprendre ce qui se passe ailleurs dans le monde et je crois que cela permettra de trouver plus de solutions pour pousser le développement du continent africain », a-t-il ajouté.
Makhtar Diop a également insisté sur la nécessaire évolution du cadre réglementaire pour favoriser une pleine exploitation du potentiel des fintechs dans un contexte de relance économique. « Je crois que l’une des leçons de la crise de Covid-19 consiste en ce que les fintechs ont réussi à s’ajuster en réduisant un certain nombre de coûts pour s’adapter et répondre à la demande croissante émanant des secteurs beaucoup moins traditionnels. Pour aller plus loin, il est nécessaire de voir également la réglementation changer, s’adapter ».
Un sens dans lequel ont abondé les autres intervenants : Meriem Zairi, Présidente de la Commission Digitale de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) ; Mohamed Horani, PDG de HPS et ancien président de la CGEM ; Hazim Sebbata, PDG de Cash Plus ; Zineb Drissi Kaitouni, cofondatrice et PDG de DabaDoc ; Driss Bennouna, DGA du Pôle Industrialisation & DOSI chez CIH ; Hamza Rkha Chaham, Fondateur & PDG, Sowit.
S’inspirer des success stories
L’inclusion financière est une question centrale dans le développement de l’Afrique tant concernant les Objectifs de développement durable (ODD) à l’horizon 2030 des Nations Unies que dans l’agenda 2063 de l’Union africaine. Pour le cas spécifique du Maroc, cette conférence a permis de mettre en exergue les forces et faiblesses du royaume chérifien en la matière.
Le Maroc dispose en effet de success stories qui ont réussi à évoluer à un moment où le cadre réglementaire était encore limité. C’est le cas notamment de HPS. Startup à ses débuts en 1995, ce spécialiste du paiement cofondé par Mohamed Horani est devenu une multinationale avec un portefeuille clients de plus de 400 banques et institutions financières dans plus de 90 pays dans le monde dont une quarantaine en Afrique. Pour son leader, « vision et ambition claires » sont des prérequis indispensables au succès d’une fintech, avant de passer par les cases « opportunités (se faire un nom, capter des marchés…), industrialisation [si l’activité le requiert, NDLR], expansion et consolidation » pour rependre l’exemple de HPS. Tout cela, outre l’indispensable évolution du cadre réglementaire.
A ce sujet justement, Meriem Zairi pense que la crise causée par la pandémie de Covid-19 a impulsé « une dynamique positive en termes de réglementation », avec notamment le moratoire fiscal accordé aux entreprises. « Quelques pas sont accomplis, mais il faut aller plus loin et ce, de manière à construire une vraie infrastructure pérenne, inclusive et qui soit vraiment créatrice de valeur. L’instauration d’un cadre réglementaire favorable aux fintechs et aux capitaux providers qui vont pouvoir adresser ces marchés, constitue un pilier essentiel vers la prochaine étape », a-t-elle expliqué.
Si par ailleurs les fintechs ont un peu bousculé les banques au départ, les deux entités évoluent depuis, non pas dans une logique de concurrence, mais de « complémentarité ». Et Driss Bennouna se dit convaincu que cette logique se renforcera à mesure que l’on évoluera vers la cashless economy.
R&D, infrastructure, formation, cybersécurité… ces leviers à amplifier
Les panélistes s’accordent à dire qu’outre ces belles avancées, l’écosystème marocain devrait davantage miser sur la recherche et développement, l’infrastructure de qualité, la formation et la la cybersécurité permettront de porter l’innovation à une dimension encore plus excellente.
Comme annoncé par Makhtar Diop, le sujet des fintechs et de l’innovation au service de l’inclusion financière sera au cœur des échanges en Afrique qui précéderont les assemblées annuelles de l’IFC qui se tiendront en octobre 2022 à Marrakech.
La Tribune Afrique