De nouveaux revenus liés aux marges d’intérêts vont pouvoir s’ajouter à ceux des activités déjà consolidées ces derniers mois.
Parfois, tout se passe comme prévu. Avec une hausse de 30% depuis le début de l’année, les valeurs bancaires européennes n’ont, cette fois-ci, pas déçu leurs actionnaires. Tout juste les actions de ce secteur ont-elles fait une pause au mois d’avril, en attendant la publication des résultats trimestriels, mais elles poursuivent depuis leur ascension, sans que les marchés soient particulièrement inquiets. Les jours qui arrivent vont cependant légèrement changer la manière dont elles seront scrutées. Les banques restent toujours très sous-évaluées par rapport au reste de la cote, avec un ratio de prix sur actif net (price to book, P/B) des banques européennes de 0,60 contre 1,9 pour la moyenne des valeurs de l’Eurostoxx. Cependant, l’indice Stoxx des banques européennes a maintenant effacé la crise sanitaire et vient tout juste de retrouver son niveau de février 2020.
Résultats supérieurs aux attentes
Plusieurs raisons ont expliqué la hausse récente des cours du secteur. Si les banques européennes ont particulièrement souffert de la crise sanitaire en 2020, elles ont finalement réussi à la passer sans trop de heurts. Au premier trimestre, 95% d’entre elles ont ainsi présenté des résultats supérieurs aux attentes des analystes. En soi, cette meilleure performance qu’attendu constitue déjà une bonne nouvelle, mais la véritable surprise est que ces performances ne sont pas uniquement dues à un coût du risque plus faible qu’en 2020. Sans prendre en compte les provisions passées, 90% des banques européennes surpassent toujours les anticipations. Les bons résultats se sont concentrés, pour beaucoup de structures, sur leurs activités de marché. Cela a été le cas, par exemple, pour les banques françaises comme BNP Paribas ou la Société Générale. Mais cela vaut aussi pour d’autres entités, comme Deutsche Bank, qui, grâce à sa banque de financement et d’investissement, a présenté en avril son meilleur premier trimestre depuis 2014. L’agence de notation Moody’s, à la suite de ces résultats, a d’ailleurs placé la note de crédit de la banque sous surveillance positive.
Le bonus des taux
Les banques européennes ont réussi à pallier le faible niveau des taux qui obère complètement leurs marges d’intérêts, c’est-à-dire les bénéfices qu’elles peuvent toucher de la différence entre le taux auquel elles prêtent et celui auquel elles se refinancent. Elles se sont restructurées, et ont, pour certaines, déjà bien avancé dans les plans d’économies qu’elles s’étaient fixés. Elles ont par ailleurs conservé des bilans sains, avec des ratios de fonds propres systématiquement supérieurs aux objectifs des équipes de direction.
Or, depuis quelques semaines, l’heure n’est plus à la baisse des taux. La reprise post-Covid devrait accélérer, accompagnée par des pressions inflationnistes. Le taux de l’emprunt à 10 ans allemand (bien qu’en légère baisse depuis quelques jours) s’approche maintenant de 0%. Cette tendance haussière des taux longs devrait contribuer à ramener aux banques des revenus desquels elles étaient privées. «Certaines banques ont mis en place des amortisseurs substantiels pour pertes sur prêts (mais avec une qualité de crédit toujours bonne), toutes les banques détiennent plus de fonds propres que leur objectif cible et le secteur traite avec une décote du ratio de prix sur bénéfice (PE) ajustée en capital de 46% par rapport au marché : surpondérer le secteur a du sens», expliquent les analystes d’UBS. Pour Scope Rating, la hausse des taux est aussi une bonne nouvelle pour le secteur. «La pentification des courbes de rendement mondiales peut signifier que les banques sont enfin payées pour ce qu’elles font de mieux : une transformation des échéances à faible risque», assure Dierk Brandenburg, analyste dans l’agence de notation.
Avec un traitement des dividendes qui doit revenir à la normale malgré les recommandations de prudence de la Banque centrale européenne (BCE), des bilans qui ont été assainis, des modèles d’activité ayant résisté à une crise d’ampleur, les banques n’ont plus aujourd’hui le statut de mouton noir des marchés, comme cela a été le cas pendant plusieurs années. Cela n’empêche pas les investisseurs de rester attentifs, non seulement à la poursuite des profits des divisions de banques de financement et d’investissement, mais aussi à la qualité des portefeuilles de prêts lorsque la fin des aides d’Etat fera monter la pression sur les défauts d’entreprises.